Par [Amoureux de la sagesse]
Istanbul —16 mai 2025
Dans une atmosphère empreinte de prudence et de méfiance, des délégations ukrainienne et russe se sont retrouvées à Istanbul pour une nouvelle tentative de dialogue, sous l’égide de la diplomatie turque. Si les caméras et les projecteurs ont été tenus à distance, c’est bien à huis clos, dans les salons feutrés d’un palais ottoman reconverti en centre de conférence, que les négociations ont discrètement repris. Mais sur le terrain diplomatique comme militaire, les signaux d’un progrès concret vers la paix demeurent faibles.
Une médiation turque qui persiste
Recep Tayyip Erdoğan, président de la Turquie, joue une carte risquée mais stratégique. Ankara, qui entretient des liens complexes tant avec Moscou qu’avec Kyiv, s’est positionnée depuis le début du conflit comme un médiateur potentiel, multipliant les canaux de communication et accueillant régulièrement des émissaires des deux camps.
« La Turquie est l’un des rares pays à conserver un dialogue direct avec les deux parties. Cela lui confère un rôle singulier, mais aussi une responsabilité considérable », confie une source diplomatique européenne proche du dossier.
Des négociations plombées par la réalité du terrain
Officiellement, les discussions portent sur une possible trêve humanitaire, l’échange de prisonniers, et la sécurisation de certains couloirs d’évacuation pour les civils. Mais en filigrane, les véritables lignes de fracture restent inchangées : l’intégrité territoriale de l’Ukraine d’un côté, la reconnaissance des annexions et les garanties de sécurité de l’autre.
Les combats, eux, continuent. Les régions de Donetsk, Louhansk et Zaporijia restent le théâtre d’affrontements quasi quotidiens. Et bien que les forces russes semblent désormais engagées dans une stratégie d’usure, les autorités ukrainiennes craignent une intensification des frappes à l’approche de l’été.
Une lassitude diplomatique croissante
À Bruxelles comme à Washington, la reprise des pourparlers est accueillie avec une prudente indifférence. « Nous avons vu beaucoup de rounds de discussions depuis 2022. Aucun n’a produit de changement structurel », analyse une analyste du Carnegie Endowment for International Peace. « Il est peu probable que cette session fasse exception. »
Pour Kyiv, la situation est doublement complexe : continuer à dialoguer sans donner le sentiment de céder, tout en maintenant la pression militaire et diplomatique sur le Kremlin. À Moscou, le pouvoir tente quant à lui d’afficher une posture de fermeté, tout en sondant discrètement les marges de manœuvre d’un éventuel compromis.
Une paix encore lointaine
Malgré le cadre symbolique offert par Istanbul, les attentes restent modestes. Les négociateurs eux-mêmes, selon plusieurs sources, reconnaissent que ces discussions ont surtout vocation à « maintenir le canal ouvert » plutôt qu’à déboucher sur une percée.
Le processus de paix reste, à ce stade, une esquisse fragile, encore très éloignée de toute signature formelle. Pour les populations sur le terrain, c’est une nouvelle qui, sans être décevante, n’apporte pas non plus de répit.