Par [Amoureux de la sagesse]
Alors que l’insécurité en Haïti atteint des sommets alarmants, une question persiste : pourquoi Normil Rameau, Directeur Général a.i. de la Police Nationale d’Haïti (PNH), est-il toujours à la tête de cette institution malgré son bilan jugé décevant par une large frange de la population et de la société civile ? Pour beaucoup, son maintien au pouvoir incarne l’échec d’une gouvernance policière sous influence, enlisée dans l’inefficacité, et déconnectée des réalités d’un pays à genoux.
Un retour qui questionne
Normil Rameau n’est pas un inconnu de la scène sécuritaire haïtienne. Nommé une première fois à la tête de la PNH en 2019 sous la présidence de Jovenel Moïse, son mandat avait été marqué par une flambée de violences, une augmentation des actes criminels, et une perte progressive du contrôle territorial de l’État. Son limogeage en 2020 n’avait surpris personne, tant l’institution qu’il dirigeait semblait dépassée.
Or, contre toute attente, le voilà de retour en 2023, comme si les échecs passés avaient été effacés d’un trait. Que justifie une telle décision ? Quels critères objectifs ont permis cette réintégration dans une période aussi critique que celle que traverse Haïti aujourd’hui ? À cette question, peu de réponses convaincantes ont été données par les autorités de transition.
Un homme sous influence ?
Les critiques les plus virulentes vont plus loin : elles présentent Normil Rameau non pas seulement comme un directeur inefficace, mais comme un instrument d’une élite politique et internationale qui tirerait les ficelles en coulisse. Certains observateurs n’hésitent pas à le qualifier de « marionnette », voire de « technicien docile » dont la loyauté semble davantage orientée vers ses parrains politiques et diplomatiques que vers la mission première de la PNH : protéger et servir le peuple haïtien.
Le rôle joué par les États-Unis dans la formation et l’orientation stratégique de la police haïtienne est également pointé du doigt. Depuis des décennies, Washington appuie logistique, formation et financement à cette force, sans résultats tangibles sur le terrain. Pour les sceptiques, il ne s’agit pas d’aide mais d’ingérence maquillée, destinée à garder un pied dans les affaires internes d’Haïti tout en laissant pourrir la situation sécuritaire à des fins géostratégiques.
La PNH : victime ou complice du chaos ?
Dans les faits, la PNH semble aujourd’hui incapable de contenir les gangs qui contrôlent plus de 80 % de la capitale. Le moral des troupes est en berne, les équipements manquent, la coordination est déficiente. Pourtant, malgré cette crise ouverte, aucune réforme d’envergure, aucun audit interne, aucune révision des stratégies de terrain ne semble émerger sous le leadership de Rameau. Au contraire, les policiers tombent les uns après les autres, les civils fuient, et les bandes armées s’enracinent.
Doit-on alors conclure que la PNH, telle qu’elle est structurée et dirigée, est condamnée à l’impuissance ? Ou pire : qu’elle fait partie du problème plus que de la solution ?
Pourquoi le maintenir ?
Face à une telle accumulation d’échecs, une interrogation devient urgente : pourquoi le gouvernement intérimaire et ses partenaires internationaux s’obstinent-ils à maintenir Normil Rameau à la tête de cette institution ? Est-ce par absence d’alternative crédible ? Par volonté de préserver un statu quo utile à certains intérêts cachés ? Ou encore, par simple aveuglement administratif ?
Quelle que soit la réponse, le message envoyé à la population est désastreux : malgré l’effondrement sécuritaire, l’institution policière n’est ni renforcée ni dirigée avec rigueur, mais laissée aux mains d’un leadership jugé inefficace, sinon complice.
Une rupture est-elle possible ?
Le pays a besoin d’une nouvelle doctrine sécuritaire, d’un leadership réformateur, crédible, indépendant et enraciné dans les réalités haïtiennes. Il est impératif de rompre avec les logiques de nomination basées sur la loyauté politique ou diplomatique, pour enfin placer à la tête de la PNH des professionnels aguerris, compétents et libres.
Rameau Normil peut-il incarner ce changement ? Rien, jusqu’ici, ne le laisse croire. Et c’est bien là tout le problème.